Nous avons tous et toutes eu parfois la désagréable impression que les publicités pour de la viande, les produits laitiers et les œufs nous prennent pour des imbéciles. Nous avons donc fait analyser les stratégies de communication de plus de 600 publicités suisses. Conclusion: des techniques manipulatoires sont utilisées pour légitimer et accroître la consommation de produits d’origine animale, sans distinction entre les produits respectueux de l’environnement et ceux issus de l’élevage intensif. Cette promotion, financée en partie avec l’argent des contribuables, n’est absolument pas cohérente avec la crise climatique et celle de la biodiversité. C’est pourquoi notre pétition demande non seulement l’interdiction des publicités financées par les impôts, mais désormais aussi l’interdiction des publicités du commerce de détail pour tout aliment d’origine animale.

Les stratégies de communication 

Dans ce nouveau rapport, les chercheurs se sont intéressés à la fois aux annonces des distributeurs (Coop, Migros, Aldi, Lidl) et à celles du système de promotion des ventes financé par de l’argent public (Pro Viande, Swiss Milk, Switzerland Cheese Marketing, GalloSuisse, SPRA).  Six grandes tendances se dégagent des publicités étudiées: 

  • le prétendu respect pour l’environnement
  • la mise en avant de traditions ancestrales
  • la spécificité de l’identité suisse
  • les stéréotypes
  • les valeurs individuelles et celles collectives.

Les principales stratégies argumentatives utilisées pour inciter le public à consommer davantage de produits d’origine animale sont les suivantes :

  • Créer des spots publicitaires sous forme de série, établissant ainsi une relation familière avec le spectateur-consommateur. 
  • Dévier l’attention pour faire oublier les enjeux, par exemple grâce à des ellipses narratives qui permettent de passer du pâturage à l’assiette (en occultant la traite des vaches ou l’abattage).
  • Recourir à l’humour pour détourner l’attention du public des questions soulevées par les processus de transformation des produits et rendre risibles les enjeux environnementaux.
  • Utiliser des arguments d’autorité, en incitant à prendre les énoncés pour vérité
  • Recourir à des stéréotypes (hommes virils et femmes végétariennes par exemple) et des valeurs qui visent à normaliser la consommation de produits d’origine animale
  • Mettre en place une confusion des mondes (« filet de légume » par exemple) : en brouillant délibérément les différences entre espèces, on nous incite à croire que les animaux sont traités à l’égal des humains, alors qu’en réalité la publicité favorise un système anthropocentré.
  • Créer un univers fictif, parfois inspiré de mythes (le symbole du feu, etc.) qui invisibilise la domination des humains sur les animaux et ses conséquences négatives.

« Nous pensons être libres de nos décisions nos achats, alors qu’en réalité notre rapport montre comment les entreprises utilisent des techniques rhétoriques douteuses pour influencer nos habitudes de consommation » explique Alexandra Gavilano, responsable de projet système alimentaire pour Greenpeace Suisse. 

Caractéristiques communes

De manière générale, on constate de nombreuses références implicites aux préoccupations écologiques ou animales afin de les contrer, voire de les tourner à l’avantage de l’annonceur (consommer du lait ou de la viande suisse, c’est protéger la nature). Cette stratégie publicitaire se base sur une ellipse des éléments dérangeants (par exemple, l’abattage, qui n’est jamais montré).

Dans le détail :les animaux sont rarement présents à l’écran dans la publicité pour la viande ; lorsque c’est le cas, ils sont désignés en tant que «produit». Inversement, la publicité pour les produits laitiers, comme le fromage et le beurre, montre souvent des animaux vivants dans une campagne idéalisée faite de grands espaces et d’une nature verdoyante. Quant à la publicité pour les œufs, elle met en exergue l’aliment lui-même, sa polyvalence, sans image aucune de poule ni de leur condition d’élevage.

La publicité encourage les habitudes alimentaires néfastes pour l’environnement

La surconsommation de produits d’origine animale contribue au réchauffement climatique, à la déforestation et à la pollution. « Nous devons donc réduire notre consommation de produits d’origine animale et c’est le rôle que devrait jouer la publicité, en particulier celle financée par les impôts. Les détaillants ont aussi un rôle à jouer, il faut réglementer de manière plus stricte les pratiques commerciales qui influencent les modes de consommation. Si les détaillants doivent adapter leur stratégie marketing pour amener leur clientèle à consommer de manière plus durable, leurs fournisseurs pourront alors adapter leur mode de production. Au lieu de cela, non seulement la publicité normalise la consommation, mais elle donne aussi au consommateur le sentiment qu’en choisissant des produits suisses, il fait un geste écologique. Alors qu’en vérité ce mode de consommation nuit à notre planète » précise Alexandra Gavilano. 

Si vous en avez marre de voir la grande distribution nous inciter à surconsommer des produits néfastes pour notre planète, merci de signer notre pétition.