La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) donne son feu vert au recours des Aînées pour la protection du climat et de quatre personnes individuelles contre la Suisse. Elle lui réserve même un traitement prioritaire. La Suisse doit dorénavant prendre position par rapport aux demandes des Aînées.
Depuis plus de cinq ans, les Aînées pour la protection du climat mènent leur combat pour le climat par la voie judiciaire. Le fait que la CEDH a accepté de traiter le cas est un gros obstacle de franchi. Ces dernières années, seule une moyenne de 5% des recours venant de Suisse ont réussi à le passer. Concrètement, cela signifie que la Cour a signifié la plainte à la Suisse et lui a demandé de lui faire parvenir une prise de position.
Mais ce n’est pas tout : la Cour réserve un traitement prioritaire au recours des Aînées. Par conséquent, la Suisse doit présenter sa prise de position d’ici mi-juillet. La CEDH demande à la Confédération de commenter explicitement le contenu de la plainte, et tout particulièrement la question de la violation du droit à la vie et à la santé. Les Aînées pour la protection du climat estiment que la politique climatique de la Confédération est insuffisante et ne protège pas assez les femmes âgées contre les conséquences de la crise climatique.
La Confédération doit donc enfin répondre aux arguments qui lui ont été soumis par les Aînées pour la protection du climat depuis 2016. Elle ne peut plus se réfugier derrière des phrases juridiques et des détails de procédure, comme cela a été fait par le Département fédéral de l’environnement, des transports, de l’énergie et de la communication (DETEC), le Tribunal administratif fédéral et le Tribunal fédéral.
Cette décision de la CEDH donne beaucoup d’espoir aux Aînées pour la protection du climat et à Greenpeace Suisse, qui les soutient depuis le tout début. « Face à la crise climatique, la Suisse doit prendre des mesures fortes pour protéger le climat et nos droits à la santé et à la vie. Nous souhaitons que la CEDH le reconnaisse », déclare Anne Mahrer, coprésidente de l’association.
Cette action en justice pour le climat pourrait marquer l’histoire. La CEDH doit apporter une réponse à la question de savoir si les Etats qui ne prennent pas assez de mesures pour protéger le climat contreviennent aux droits humains. Une telle réponse aurait des répercussions pour la Suisse, mais aussi pour les 46 autres États membre du Conseil de l’Europe, signataires de la Convention européenne des droits de l’homme.
L’heure de la justice climatique a sonné
L’action en justice pour le climat initiée en Suisse est la deuxième affaire concernant le climat que traite la CEDH. Fin 2020, la CEDH avait donné son feu vert à la requête de six jeunes venus du Portugal. Ils reprochent à la Suisse et à 32 autres États européens d’avoir renforcé la crise climatique et d’avoir ainsi mis en péril l’avenir de leur génération. La CEDH a donné la priorité à ce recours du fait de l’importance et de l’urgence des questions soulevées.
En février, le mouvement l’Affaire du siècle a pu fêter une victoire historique, car un tribunal a décidé que l’inactivité de l’Etat français face à la crise climatique est illégale. Cette action en justice pour le climat menée entre autres par Greenpeace France a été soutenue par plus de 2 millions de Français. Il y a plus d’un an, la Cour suprême de La Haye a confirmé un arrêt d’un tribunal de district de juin 2015 selon lequel les Pays-Bas doivent diminuer d’ici fin 2020 leurs émissions de CO2 de 25% par rapport à celles de 1990.
Et déjà, la prochaine plainte relative au climat attend d’être entendue par la CEDH: il y a quelques jours, une organisation d’aînés norvégienne a déposé sa requête. Cette organisation attaque la Norvège dans le cadre de la lutte contre les forages pétroliers dans les eaux de l’Arctique.
L’action en justice des Aînées pour la protection du climat
En 2016, les Aînées pour la protection du climat et quatre personnes agissant en leur nom propre se sont adressées à la Confédération pour demander un renforcement de la protection du climat eu égard à leurs droits fondamentaux à la santé et à vie. Elles n’ont jamais été entendues. Le Tribunal administratif fédéral puis le Tribunal fédéral ont rejeté leur requête. C’est pour cela qu’en novembre 2020, les Aînées pour la protection du climat ont recouru à la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) à Strasbourg. Dans ce recours, les Aînées critiquent l’atteinte à leur droit à la santé et à la vie, au droit à une procédure équitable devant un tribunal et le droit à un recours effectif devant une instance nationale.