Alors que la déforestation globale suit son cours au rythme effréné d’une surface équivalente à un terrain de football toutes les deux secondes, Greenpeace s’est rendue au salon du livre pour parler des forêts anciennes. Plusieurs visiteurs du salon du livre se sont arrêtés sur le stand d’information, tenu par les bénévoles du groupe régional de Genève, ainsi que devant la scène du village alternatif pour écouter des experts s’exprimer à propos du pillage des forêts anciennes et des effets qu’elle a sur les populations locales.
Cette année, Greenpeace était présente au Salon du livre pour parler des forêts anciennes. (Cameroun/Afrique) ©Greenpeace/Morgan (Archives)
«Mes parents vivent dans la forêt camerounaise,
j’ai grandi là-bas.», commence Marguerite Ndô Eba, une des invitées
de la table ronde qui est actuellement stagiaire au projet « Kids
for Forest » à Zurich, «Cette forêt est notre supermarché, notre
pharmacie, notre source de vie. Nous y trouvons de la nourriture,
des plantes médicinales, des remèdes phytosanitaires, de quoi
fabriquer nos habitations, embarcations et outils. Nous n’avons
aucun compte en banque, aucun salaire mensuel, la forêt est notre
patrimoine et notre héritage. Pourtant, il suffit aux grandes
multinationales de faire quelques promesses à notre gouvernement et
d’immenses concessions leur sont attribuées. C’est à ce moment-là
que la population forestière découvre, impuissante, que la forêt
appartient à l’Etat. Les concessions englobent souvent des parties
de la forêt dans lesquelles vivent des gens qui n’ont aucun titre
de propriété, mais y vivent depuis des temps ancestraux. La
population n’a pas son mot à dire, on lui apporte du poisson pour
l’amadouer, puis on rase la forêt dont elle vivait.»
Le triste bilan du Cameroun ne doit pas devenir celui du Congo,
et pour cela, il est indispensable que nous agissions rapidement
car la corruption fait rage et les lois ne sont appliquées qu’avec
parcimonie. Alain Kounzilat, ingénieur du bois et directeur de
publication de «Nouvelles Congolaises» et des éditions ICES
s’exprime ainsi: «Les personnes qui gouvernent notre Etat ne
s’occupent pas de faire respecter la loi, mais préfèrent bien
souvent s’en mettre plein les poches. Dans ces circonstances,
comment voulez-vous empêcher les multinationales de poursuivre la
destruction des richesses de notre pays?»
Mais comment palier à ce problème? «Il faut réévaluer
l’attribution des concessions» affirme Patrick Fischer,
agrotechnicien tropical de Grünwerk, «Une utilisation responsable
des ressources passe par l’attribution de concessions à des
communautés qui vivent de la forêt car ils connaissent sa valeur,
ils ne prendront que ce dont ils ont besoin et ils la soigneront.
En Suisse, ce sont nos agriculteurs qui s’occupent de l’entretien
du paysage, alors pourquoi ne pas appliquer ce modèle à
l’Afrique?»
Pourtant, cela ne suffira pas car le bois coupé illégalement
trouve malgré tout encore preneur. «C’est un problème global. Si
nous voulons enrayer ce phénomène et limiter les dégâts, il faut
que les pays qui importent le bois mettent en place une législation
contraignante et la fassent respecter. C’est également au
consommateur de faire attention à ce qu’il achète. Il s’agit de
privilégier les produits en bois suisse ou qui portent le label FSC
s’ils proviennent de régions lointaines ainsi que le papier recyclé
ou certifié.», explique Natalie Favre, porte-parole de Greenpeace.
La déforestation étant responsable d’un cinquième des émissions de
gaz de serre de la planète, elle contribue de façon massive au
bouleversement climatique. Dès lors, il semble évident que nous
avons besoin d’une solution globale qui passe par une prise de
conscience de chacun des maillons de la chaîne.