Ce texte a été rédigé par Mathias Schlegel, porte-parole pour Greenpeace Suisse. Il fait partie d’une série d’articles sur l’agriculture publiés par le média zurichois Tsüri.ch en collaboration avec Greenpeace Suisse.

Le réchauffement climatique fait peser de nombreuses menaces sur l’avenir de l’agriculture. La généralisation d’événements météorologiques extrêmes et de conditions climatiques inhabituelles sont les défis à affronter à l’avenir pour produire des aliments.  Or non seulement la production alimentaire industrielle est mal préparée, mais elle aggrave la situation en continuant aveuglément sa course à la productivité et à l’accaparement de nouvelles terres. Deux phénomènes qui favorisent fortement l’effondrement de la biodiversité et la capacité de la planète à absorber le CO2 et ainsi à réguler le climat.

Face à ces défis, de nombreux experts ainsi que toutes les agences onusiennes en charge des questions liées à l’alimentation appellent à augmenter la résilience des systèmes agricoles, soit leur capacité à résister à des crises ou à se relever en cas de catastrophe. Parmi les nombreux outils nécessaires pour améliorer la résilience, l’agriculture urbaine joue un rôle important. Elle permet notamment d’augmenter l’autosuffisance alimentaire et de promouvoir une meilleure alimentation, tout en sensibilisant les citadins à la production agricole et au rôle des agriculteurs au sein de la société. Les projets d’agriculture urbaine offrent en outre des avantages qui ne sont pas liés à l’alimentation: protection contre les îlots de chaleur, gestion des déchets organiques, gestion des espaces verts, etc..

A l’ouest, du nouveau

En Suisse romande, l’agriculture urbaine est en pleine expansion. Présents dans 7 villes et 3 cantons romands, les Incroyables comestibles sont une initiative née en 2008 en Angleterre et portée en Suisse romande par des dizaines de bénévoles. Le projet consiste à cultiver des plantes agricoles dans les espaces publics des villes et de laisser les aliments en libre-service pour les habitants. De nombreux projets citoyens de différentes tailles émergent dans les villes romandes. Et des entreprises émergent pour accompagner le mouvement. C’est notamment le cas de Légumes perchés, une start up lausannoise qui a reçu récemment le prix SUD (pour Start-up durable) remis par le journal Le Temps en novembre 2020. L’entreprise développe des projets d’agriculture urbaine sur les toits des bâtiments, que ce soit des immeubles existants ou en accompagnant la construction de nouveaux quartiers. 


Voulez-vous manger de manière respectueuse du climat ? Le poster « All you can eat » illustre le score CO2 de 500 aliments et se laisse facilement aimanter sur votre réfrigérateur.


Dans le canton de Genève, des projets d’agriculture urbaine sont dorénavant intégrés dans certains nouveaux projets de construction avec le concours des autorités communales et cantonales. L’objectif est de développer des « points relais agricoles en zone urbaine », soit des fermes urbaines qui produisent des aliments, vendent et promeuvent les produits agricoles locaux et sensibilisent le public aux questions liées à l’alimentation. Pour l’heure, elles sont au nombre de quatre. 

Historiquement les fermes de Budé et du Lignon produisent depuis de nombreuses années des denrées alimentaires en milieu urbain en suivant les principes de l’agriculture paysanne c’est-à-dire qu’elles organisent leurs activités autour des trois piliers du développement durable: l’économie, l’environnement et les aspects socio-culturels. La première se trouve entre la gare et l’aéroport, en plein quartier international, et la seconde au Lignon, un quartier construit dans les années 1960 et qui abrite en son sein la plus grande barre d’immeuble d’Europe. 

A Meyrin, troisième ville du canton de Genève avec plus de 25’000 habitants, le nouveau quartier des Vergers – plus de 1’300 logements sur 30 bâtiments dont la construction s’est terminée en 2020 – intègre une ferme urbaine qui poursuit plusieurs objectifs. La commune de Meyrin mandate la ferme pour des travaux paysagistes. La ferme cultive également des parcelles au sein du nouveau quartier et elle anime des projets pédagogiques pour les écoliers et les jardiniers amateurs. Elle est surtout au cœur d’un projet d’autonomie alimentaire pour les habitants du quartier et collabore avec plusieurs fermes genevoises pour approvisionner les habitants, toujours dans le respect des principes de l’agriculture paysanne. 

A Bernex, une petite ville située tout au bord de la zone urbaine de Genève, un projet d’urbanisme encore plus grand que celui des vergers (plus de 5’000 logements envisagés d’ici à 2030 et autant d’emplois) est accompagné de l’établissement d’un espace vert de 8 hectares qui abrite lui aussi une ferme urbaine dont la production sera mise à disposition des habitants en vente directe. L’objectif est de recréer un lien entre populations urbaines et agriculteurs.