#COP21
Paris n’est qu’un début!
La Conférence de Paris restera-t-elle dans l’Histoire? La communauté internationale a entériné la fin des énergies fossiles à Paris, afin de se donner une chance d’éviter les pires conséquences envisageables du réchauffement climatique pour l’humanité. Le chemin ainsi défini est le bon et l’objectif de limiter le réchauffement à 1,5°C est un véritable progrès. Mais cet accord seul ne suffira pas à sauver le climat. Il faudra réaliser encore bien des efforts pour enfin parvenir à faire tourner la roue de l’Histoire.
L’objectif de limiter le réchauffement à moins de 2°C est indéniablement un véritable progrès. Les émissions de CO2 devront atteindre leur maximum rapidement, puis baisser pour arriver à une situation de «zéro émission». C’est une bonne nouvelle, même s’il faut rester très vigilant face à ce qui se cache derrière le concept de «zéro émission», qui laisse la porte ouverte aux meilleures solutions – les énergies renouvelables – comme aux pires: le stockage de carbone, la géoingénierie, les mécanismes de compensation divers. Reste que le simple fait que 195 États soutiennent ces objectifs est très positif.
Même si l’accord ne fixe pas d’échéancier pour l’élimination des émissions de CO2 issues des activités humaines, il représente quand même une mauvaise nouvelle pour l’industrie des énergies fossiles. Selon les analyses de l’ONU, si l’on souhaite fixer le réchauffement de 2°C comme le maximum à ne pas dépasser, les émissions de CO2 devront être entièrement éliminées entre 2060 et 2075. Et si l’objectif est 1,5°C, alors, il faudrait atteindre cet objectif d’ici à 2050. Ces dates ne sont pas précisées dans l’accord, mais on peut les déduire d’après les textes. C’est donc un pas important vers une transition énergétique qui doit nous amener vers 100% d’énergies renouvelables pour tous en 2050.
Mais ces éléments réjouissants ne suffiront pas à nous assurer la clémence de nos descendants… Les objectifs affichés pour limiter le réchauffement ont beau être très ambitieux, les mesures de protection du climat et les engagements financiers restent trop faibles et toujours pas assez contraignants. L’analyse des contributions des États (Intended Nationally Determined Contributions: INDC), montre que pour l’heure nous nous dirigeons vers un réchauffement supérieur à 3°C. Pour limiter le réchauffement à 1,5°C, il faut au minimum doubler les contributions nationales.
Pour la Suisse cela signifie, que le Conseil fédéral doit faire passer l’objectif de réduction des émissions de CO2 d’ici à 2020 de 20 à 40%. La loi sur le CO2 lui en donne le pouvoir. Il faut également que le Parlement définisse un nouvel objectif pour les réductions à atteindre d’ici à 2030, soit 60%, et ce, uniquement avec des mesures réalisées sur le territoire helvétique. Parallèlement, il faut qu’à partir de 2020 la contribution financière à la protection du climat, dans les pays les plus pauvres, atteigne 1 milliard de francs par année, sans péjorer le budget de l’aide au développement.
Si l’accord de la COP21 est une étape importante, le mouvement pour la protection du climat doit devenir encore plus actif. Les profiteurs issus d’un âge ou l’on pouvait émettre du CO2 sans la moindre contrainte ne vont pas se rendre sans combattre. Mais, si nous nous mobilisons, nous pouvons leur rendre la vie impossible. Dès le début de 2016, nous lutterons ensemble avec les victimes du réchauffement contre nos adversaires et montreront clairement que nous sommes prêts à les stopper, là ou les gouvernements se montrent incapable de le faire. S’il le faut, nous userons de la voie juridique pour atteindre nos objectifs. C’est la seule façon de s’assurer que la Conférence de Paris devienne ce qu’elle doit être: le début de la fin de l’ère des fossiles et un moment charnière dans l’histoire de l’humanité.
L’analyse détaillée de l’accord de Paris, montre encore bien d’autres points sur lesquels il faut rester actif. Voici ceux qui nous semblent les plus critiques:
- Les responsables du réchauffement climatique n’ont pas promis assez pour aider les victimes. Il est positif de voir que l’objectif d’alimenter le Fond vert pour le climat à hauteur de US$ 100 milliards par année a été maintenu, et que cette manne devra être augmentée après 2025. Mais pour l’heure les engagements pris par les pays les plus riches sont loin d’être suffisants pour atteindre cet objectif.
- Il est reconnu que la gestion des pertes et dommages, d’ores et déjà causés par le réchauffement, est une tâche importante. Malheureusement il n’est pas prévu de système de compensation par les responsables de ce réchauffement: les pays industrialisés.
- La nécessité de contrôler régulièrement les efforts réalisés en matière de protection du climat en toute transparence est reconnue. Mais il n’y a pour l’heure aucune proposition concrète sur la table.
- Il est prévu d’évaluer les efforts des États tous les 5 ans afin de les améliorer constamment. Mais ici aussi il manque les prescriptions en ce qui concerne la mise en œuvre concrète de cette mesure. Il est pourtant primordial que les politiques climatiques des États soit immédiatement adaptées aux nouveaux objectifs définis à Paris. La fenêtre d’opportunité pour limiter le réchauffement à 1,5°C va se fermer rapidement.
- Il est toujours possible de recourir au marché carbone, soit l’échange de certificats d’émissions entre pays, afin «d’atteindre» les objectifs de réduction des émissions de CO2. C’est particulièrement dangereux, car cela permet aux états, dont la Suisse, de repousser la transition énergétique aux calendes grecques. Sur la scène politique, il est malheureusement tentant de penser qu’il est plus simple et bien moins cher de réduire les émissions de CO2 dans des pays tiers, plutôt qu’à l’intérieur de ses propres frontières. Ajoutons, que le mécanisme de ces échanges n’a pas encore été clairement défini, et qu’on ne sait toujours pas quels garde-fous permettront d’éviter les erreurs du passé, où l’échange de certificat a régulièrement entraîné une augmentation des émissions.
Plus d’informations
- Texte de l’accord de la COP21
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